Wiki – Minitel

Le Minitel (pour « Médium interactif par numérisation d’information téléphonique ») est un type de terminal informatique destiné à la connexion au service français de Vidéotex baptisé Télétel, commercialement exploité en France entre 1980 et 2012.

Sommaire

Historique

Cette technologie de communication à la porteuse caractéristique (fréquence au sifflement aigu) a été développée par le ministère des Postes et Télécommunications et utilisée en France, essentiellement dans les années 1980 et 1990, avant d’être supplantée par l’accès à Internet. Par métonymie, le mot « Minitel » a fini par désigner l’ensemble du service Vidéotex en France ainsi que les éléments de réseau (concentrateurs, points d’accès) destinés à rendre ce service.

En février 2009, selon le groupe France Télécom, le réseau de Minitel enregistrait encore 10 millions de connexions mensuelles sur 4 000 codes de services Vidéotex, dont un million sur le 3611 (annuaire électronique). En 2010, 2 millions de personnes utilisaient encore le minitel, pour 200 000 euros de chiffre d’affaires. Le service a été fermé par France Télécom – Orange le 30 juin 2012. L’arrêt du Minitel est une conséquence de la décroissance des usages et de la fermeture du réseau support de l’offre Minitel. Ce réseau support étant de moins en moins utilisé, et compte tenu des évolutions technologiques, il a été décidé d’arrêter son exploitation.

Contexte

Depuis la fin des années 1950, les ingénieurs du Centre national d’études des télécommunications ont développé des ordinateurs, puis des réseaux numériques expérimentaux, en collaboration avec l’industrie électronique et le Plan Calcul. Leurs homologues américains, anglais ou allemands font de même, dans une ambiance d’émulation internationale. Divers projets – visiophone, annuaire électronique, réseaux d’ordinateurs, etc. – contribuent à former dans ce milieu d’ingénieurs une vision des télécommunications futures, soutenue par les moyens financiers considérables investis dans le plan de rattrapage téléphonique des années 1970. Le directeur technique du Centre commun d’études de télévision et télécommunications à Rennes, Bernard Marti, coordonne les travaux d’une équipe à l’origine du Minitel, le projet Minitel étant supervisé par Jean-Paul Maury, directeur du projet « Annuaire Électronique et Minitel » (1979 – 1985). D’après Bernard Marti, le nom « Minitel » serait l’abréviation de « Médium interactif par numérisation d’information téléphonique ».

En 1977 la remise au président de la République française, Valéry Giscard d’Estaing, puis la publication du rapport sur l’informatisation de la société rédigé par Simon Nora et Alain Minc, accélèrent la prise de conscience par les dirigeants et par l’opinion française d’une révolution technologique, baptisée « télématique » : la connexion de terminaux permet la visualisation de données informatiques stockées dans des ordinateurs à travers les réseaux de télécommunications. L’année suivante, en 1978, la France décide de lancer un réseau vidéotex accessible par un terminal peu onéreux. Cette décision sera rendue publique par Gérard Théry (directeur de la DGT) à l’Intelcom 79 de Dallas (Texas) qui réunit le gratin mondial des télécommunications. Il y annonce avec une certaine emphase le déclin de l’ère du papier.

Le concurrent américain du Minitel est le système NAPLPS. Conçu comme vecteur de vente à domicile, il met l’accent sur un affichage en couleurs de qualité photographique. À cause du coût des composants et du faible débit des lignes de l’époque — surtout aux États-Unis — la déception est sévère :

  • l’affichage de certaines pages pouvait prendre une durée de six minutes ;
  • le mixage de texte et de graphiques, qui ne posait pas de problème avec les caractères semigraphiques de basse qualité du Minitel, n’était pas possible sans faire monter le coût de réalisation du terminal à des valeurs prohibitives en RAM et en ROM.

Seuls restèrent en lice le Minitel, le Prestel (en), le Ceefax, le Bildschirmtext (de) — tous en Europe, tous fondés sur la norme Vidéotex. La réalisation du Minitel ayant été confiée à trois industriels différents (Matra, Radiotechnique (Philips) et TélicAlcatel), le prix de série put être négocié au plus bas en tenant compte d’une hypothétique, mais probable, baisse future des prix de revient par l’évolution technologique et l’accroissement des quantités produites par les fournisseurs.

Le programme Télétel (nom du réseau des terminaux appelés Minitel) est reconnu dans le monde entier comme le premier réseau télématique grand public et comme un succès commercial.

Par la suite, les services commerciaux du Minitel ont subi la concurrence d’Internet, dû à un manque de volonté de certains dirigeants à aller, d’après Bernard Marti, vers davantage d’affichage d’images ou de dessins.

Inventeur

Un système aussi complexe que Télétel n’a évidemment pas « un inventeur », mais résulte de multiples projets et décisions. Dans le film La Personne aux deux personnes (2008), un faux journal télévisé animé par Patrick Poivre d’Arvor annonce le décès par accident de l’inventeur du Minitel : l’ingénieur Jean-Yves Pouchard.

Expérimentation

La phase d’expérimentation commence en 1980 à travers plusieurs opérations sur le terrain :

Annuaire électronique

L’un des 55 premiers terminaux distribués à Saint-Malo montre un plan des remparts (l’Intra-muros)
Il était pourvu d’un clavier ABCD.

Alors qu’il est prévu de fabriquer 30 millions de Minitels, Valéry Giscard d’Estaing, devant le lobby de la presse qui voit un concurrent dans cette nouvelle technologie, se ravise et décide de lancer des expérimentations.

En juillet 1980, à Saint-Malo, les 55 premiers utilisateurs de l’annuaire électronique sont équipés. En 1981, 4 000 Minitels sont distribués en Ille-et-Vilaine. Il s’agit de tester ce nouveau service chargé de remplacer l’annuaire papier. Il devait aussi alors alléger le service traditionnel des renseignements, passablement saturé devant la croissance du parc téléphonique fin des années 1970. Il se justifiait aussi par l’efficacité d’un service de renseignements recouvrant l’ensemble des abonnés au téléphone en forte croissance. Les publications des annuaires papier, constamment dépassées, créaient une forte demande sur les renseignements téléphoniques alors assurés par des fonctionnaires des PTT.

L’expérience de l’annuaire électronique ayant entraîné une forte résistance de la presse quotidienne régionale (Ouest-France en tête), le ministère des PTT eut l’idée de désamorcer la fronde en organisant une autre expérience incluant d’autres services (petites annonces, informations, messageries) qui se déroula à Vélizy, ville dont le nom est devenu un terme générique dans le jargon du milieu de la télématique.

Expérience Télétel 3V

Terminal Vidéotex Thomson utilisé lors de l’expérience Télétel de Vélizy en 1980.

À l’automne 1980, 2 500 foyers volontaires de Versailles, Vélizy-Villacoublay, Jouy-en-Josas, Buc, Bièvres et Les Loges-en-Josas reçoivent un terminal Vidéotex. Du côté des services, près de 200 fournisseurs participent à l’expérience, se donnant ainsi l’occasion de tester ce nouveau moyen de communication auprès du public. Les services remportant la plus large adhésion seront les annuaires téléphoniques pages blanches et pages jaunes (services gratuits), la presse, la vente par correspondance, la SNCF, les banques ainsi que la messagerie.

Si l’expérience de Vélizy reste un symbole dans le monde de la télématique, c’est que cette expérience est la source de la création de la formule « kiosque télématique » qui permet de répartir les revenus entre l’opérateur et les fournisseurs de services, notamment à travers le 3615. En effet, si les éditeurs de presse ont progressivement compris l’intérêt de cette expérience, ils voulaient en tirer des revenus. Conséquemment, d’après des discussions auxquelles participent notamment Mme Martine Tournier (le Parisien Libéré), M. Roger Lajus (Hachette Filippacchi), les hommes de la DGT ont l’idée d’utiliser le système de surtaxation utilisé pour le réveil téléphoné. Cela donne lieu, en février 1984, à la création du kiosque mis en priorité et en exclusivité à la disposition de la presse.

À Vélizy, le premier terminal n’a pas d’écran et se glisse sous le téléviseur : simple décodeur, il permet de consulter une vingtaine de services sur l’écran du téléviseur. La télécommande est élémentaire : juste un clavier alphanumérique en majuscules. Un groupe d’utilisateurs passionnés fonde l’AATEL (Association des abonnés à TéléTEL), qui devient une véritable interface entre les testeurs et la DGT – DACT (Direction générale des télécommunications – Direction des affaires commerciales et télématiques) qui dirige le projet. De leur côté, les entreprises créent l’AFTEL (Association française des fournisseurs de services télématiques). Les liaisons distantes sont établies via le réseau Transpac par le numéro d’accès 612 34 56.

La toute première messagerie, uniquement par boîtes aux lettres, est baptisée M3V. On peut y échanger des messages privés, ou par l’intermédiaire de groupes de discussion thématiques. À l’époque, la DACT et les fournisseurs de services pensent qu’il ne s’agit que d’un gadget ludique : pour eux l’avenir de la télématique réside dans l’information, et non la communication. Il est même question de supprimer cette messagerie. Mais l’AATEL se bat pour la conserver et démontrer qu’elle est une motivation primordiale des utilisateurs, ce que confirmera le développement de la télématique grand public en France. C’est seulement fin 1982 qu’apparaît le premier Minitel. L’expérience est définitivement arrêtée au printemps 1984.

Expérience Gretel

À l’hiver 1981, les Dernières Nouvelles d’Alsace lancent le service expérimental Gretel sur un quartier pilote à Strasbourg. L’expérience débute avec 80 foyers, puis est progressivement étendue.

Les premiers services proposés sont des consultations des actualités, des programmes de télévision et de cinéma, et de la météo, ainsi que quelques jeux. On trouve aussi un service de messagerie électronique de type courriel avec une notion de boîtes aux lettres.

Mais ce qui fait exploser le succès de l’expérience est le lancement en 1982 du premier service de messagerie instantanée, principe découvert à la suite d’un piratage. Ce nouveau service représente très rapidement jusque 85 % du trafic. L’ancêtre des messageries instantanées et de l’internet social est alors né. C’est ainsi qu’apparaissent des services créés par de jeunes entrepreneurs comme Thierry Roze et Xavier Niel.

Lancement commercial

Lancé en France en 1982 par les PTT, le minitel permet d’accéder à des services en ligne dont les plus populaires sont :

  • Le 3611 : anciennement, le 11, l’annuaire téléphonique (initialement gratuit les trois premières minutes, puis devenu payant dès la connexion depuis le 1er septembre 2007). Le service 3611 est alors le service le plus utilisé. Il était censé disparaître définitivement en mars 2009 mais sa mort est une nouvelle fois reportée.
  • La vente par correspondance (de billets de train par exemple).
  • Les sites de rencontres et messageries roses (Sextel de Cyrille Jubert, 3615 ALINE de Claude Perdriel, 3615 ULLA).

Entre 1984 à 1988, l’essor du Minitel explose grâce au succès des messageries instantanées, nées des expériences des services STEL à Nice et GRETEL à Strasbourg (serveur à l’initiative des Dernières Nouvelles d’Alsace), ainsi que SM à Paris (Serveur médical de Canal 4). Au printemps 1985 naît la première messagerie grand public sur le 3615, créée par deux anciens de Teletel3V pour le Parisien libéré, nommée MESPL.

L’État français, par le ministère des PTT, a fortement encouragé le développement du Minitel. Les PTT ont ainsi distribué gratuitement les terminaux (des terminaux plus évolués ont ensuite été vendus ou loués). Cette décision était motivée par les économies de fabrication, de distribution et de recyclage de millions d’annuaires papier chaque année. Ainsi, les foyers équipés de Minitel ne recevaient plus que les pages jaunes, au lieu des pages blanches et des pages jaunes. Ce modèle économique, inventé pour le Minitel et consistant à subventionner le terminal par le prix du service, a été fortement critiqué à l’époque par la presse. Il a depuis été repris pour les services de téléphonie mobile.

Seul le 3618 ou service MIAMI (service de communication de Minitel à Minitel) est resté en service jusqu’au 3 novembre 2014. En effet ce service ne dépendait pas du même réseau support.

Services télématiques

Le Minitel (programme Télétel) revint à plus de huit milliards de francs en équipements de terminaux avec une durée de vie estimée de huit ans pour les Minitel. Pendant le même laps de temps, le chiffre d’affaires des services télématiques atteint les 3,5 milliards de francs et les économies de papier atteignirent 500 millions de francs par an. En 1985, le million de Minitel en service est atteint en France ainsi que le million d’heures de communications de services par mois. Avec l’explosion des services liés au 36 15, le réseau Transpac qui véhicule le trafic Télétel, connait une panne en juin 1985 qui conduit à une altération prolongée du service pour la plupart des abonnés au Minitel. La situation ne redeviendra normale qu’au bout de deux semaines.

Au début des années 1990, le Minitel équipait 6,5 millions de foyers. Il dépassait de loin le nombre d’utilisateurs du réseau CompuServe, qui offrait en Amérique du Nord des services semblables, et plus encore de Prodigy qui lui ressemblait davantage parce qu’utilisant le code Vidéotex, raison pour laquelle dès la fin des années 1980, les Américains s’intéressèrent de très près au réseau Vidéotex français. À un moment où les Français s’interrogeaient sur l’avenir du Minitel, les agences financières de Wall Street notaient déjà le formidable bénéfice à attendre d’un tel programme. C’est pourquoi le futur vice-président Al Gore envoya un jeune homme, David Lytel, enquêter non sur les techniques utilisées mais sur les contenus des services offerts. Ce rapport fut à la source du discours sur « les autoroutes de l’information » prononcé par Al Gore en juillet 1994.

Le réseau Télétel du Minitel comportait au départ deux types de facturation : 3613 (communication payée par le service) et 3614 (communication payée par l’usager, 20 francs – 3,05  – par heure environ, pas de rémunération du service, réduction en heures creuses). En février 1984 fut créé le système kiosque avec le 3615. La rémunération du service est 60 francs – 9,15  – par heure environ, payés par l’usager, dont 40 F (6,10 ) pour le service et 20 francs (3,05 ) pour France Télécom, système de « taxation arrière » souhaité par l’industrie de la presse pour rendre son contenu payant.

Ces numéros courts à quatre chiffres ont remplacé les numéros initiaux, au gré de l’évolution du plan de numérotation de l’opérateur historique :

  • 11 jusqu’au 18 octobre 1996 à 23 h, puis 3611
  • (16) (3) 613 91 55, puis 36 13 91 55 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3613 depuis le 10 juillet 1986
  • (16) (3) 614 91 66, puis 36 14 91 66 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3614 depuis le 10 juillet 1986
  • (16) (3) 615 91 77, puis 36 15 91 77 après le 25 octobre 1985 à 23 h, puis 3615 depuis le 10 juillet 1986

L’apparition du kiosque en 1984 fait exploser le nombre de services qui passe de 145 en 1984, à 2 074 en 1985, 5 000 en 1987 et 25 000 en 1996. Cette année-là les services génèrent près d’un milliard d’euros de revenus pour un parc installé de 6,5 millions de terminaux. Les messageries dont les messageries roses participent fortement à la diffusion du Minitel. Elles représentent 50 % des appels en 1990.

En 2000, le Minitel était encore utilisé par près de 25 millions de personnes (pour 55 millions d’habitants) avec un parc de près de 9 millions de terminaux. Il restait toujours très utilisé, y compris pour les transactions commerciales, à tel point que certains moteurs de recherche comme Yahoo! ou AltaVista y avaient un service Minitel. Cependant les services à facturation de type 3615 ou supérieur étaient vivement concurrencés par le Web. L’arrêt prévu en mars 2009 du service 3611 annuaire électronique est reporté devant le nombre significatif de connexions. Selon France Télécom le 3611, qui représentait encore le quart du trafic Télétel, avait enregistré 19 millions de connexions en 2008 et 4 000 éditeurs de services étaient toujours présents sur le Minitel. Le 3611 s’arrêta, comme les autres services Minitel, le 30 juin 2012.

L’annuaire électronique 3611 a été progressivement remplacé par l’annuaire Internet, avec les sites www.pagesblanches.fr et www.pagesjaunes.fr (vendu en 2006 à l’Américain KKR). Le succès de l’annuaire électronique était tel que France Télécom a pris du retard sur son annuaire Internet.

Les serveurs (numéros de téléphone) auxquels on se connectait avec un Minitel étaient appelés des services Télétel. C’était en effet des passerelles vers le réseau Télétel, basé sur Transpac, qui permettait de mettre en relation les Minitel avec les serveurs des prestataires de service. En marge de ces services Télétel, il était tout à fait possible de composer des numéros classiques à 8 puis 10 chiffres, que ce soit pour se connecter à un autre Minitel configuré en mode « retourné », ou pour accéder à des serveurs « RTC » directement connectés sur le réseau téléphonique commuté, donc non surtaxés. Une communauté de passionnés fréquentait ainsi régulièrement ces micro-serveurs Minitel similaires (en plus accessibles) aux serveurs BBS qui se développaient aux États-Unis et ailleurs. À l’échelle locale, des collectivités proposaient également de tels serveurs Minitel à accès direct. Aujourd’hui encore, de nombreux systèmes de télégestion utilisent ce système, aussi bien en appel entrant (visualisation de données et d’événements ou émission d’ordres) qu’en appel sortant (télé-alarme).

Expansion internationale

En 1988, le professeur Bruno Lussato disait : « On nous dit que le monde entier nous envie le Minitel. Je ne sais pas s’il nous l’envie, messieurs, mais je peux en tout cas vous dire une chose avec certitude, c’est qu’il ne nous l’achète pas ».

Le système Minitel a été implanté avec plus ou moins de succès dans plusieurs pays :

  • Allemagne : Bildschirmtext ou BTX, qui est un système centralisé, à l’encontre du Minitel français.
  • Belgique avec Belgacom.
  • Espagne : Ibertex via Telefonica. En 1991, il y avait 275 000 terminaux installés. L’installation coûtait l’équivalent de 255  et le coût mensuel variait entre 179  et 409 , selon la vitesse du modem (de 2 400 à 9 600 bauds);
  • Grande-Bretagne : Prestel, mais ce système ne réussit pas à s’implanter au niveau résidentiel ;
  • Irlande : Telecom Eireann (1988) ;
  • Italie : SIP (1985) ;
  • Pays-Bas : Viditel et Vidéotex ;
  • Afrique du Sud : Beltel (1986) avec Telkom ;
  • États-Unis : via Qwest à Minneapolis et Omaha (1990).
  • Canada : En 1988, Bell Canada lance Alex, « un service électronique d’information et de transactions fortement influencé par le système français Minitel ». Le service est d’abord offert à Montréal puis à Toronto. En 1991, il comptait 32 000 abonnés, mais le taux de rétention est proche de zéro en raison des frais de connexion. L’intérêt baisse rapidement à mesure que se répand l’usage du Web. Le service est abandonné en décembre 1994.

Facturation

Les premiers modèles de Minitel étaient prêtés par France Télécom à ses clients sans abonnement mais facturés au temps de communication. La facturation s’effectuait par comptabilisation sur la facture téléphonique. Un serveur pouvait, soit être contacté directement par le réseau téléphonique (no  d’appel direct), soit être connecté à un des réseaux kiosques (3613, 3614, 3615etc.). Les derniers modèles comme le Magis et le Magis Club étaient loués par France Télécom.

Technique

Xtel : logiciel émulateur de terminal Minitel.

Le Minitel est un terminal informatique passif, c’est-à-dire qu’il se comporte uniquement comme un clavier et un écran, avec une très faible capacité de traitement (traitement du protocole vidéotex) et pas de dispositif de stockage. Les services sont accessibles depuis une ligne de téléphone grâce au modem V23 incorporé (1 200 bit/s en réception, 75 bit/s en émission). Le Minitel était muni de prises en T pour la connexion au réseau téléphonique de France Télécom.

L’écran du Minitel est une matrice texte d’une taille de 25 lignes par 40 colonnes en mode Vidéotex (8 nuances de gris) et se base sur un système de codage qui lui est propre. Un jeu de caractères graphiques, chacun constitué de 6 gros pixels, lui permet d’afficher des images en mode « mosaïque », un peu à la manière de l’art ASCII.

Caractéristiques du Minitel 1B

  • Modem V.23 (1 200 bit/s en réception – 75 bit/s en émission) « retournable », E71 intégré.
  • Affichage Vidéotex en 40 colonnes et 8 couleurs (alpha-mosaïque) et mode téléinformatique 80 colonnes type VT100.
  • Raccourcis clavier (touche Fnct enfoncée en même temps qu’un chiffre ou une lettre) pour accéder à des modes avancés.
  • Transmission par voie série entre un micro-ordinateur, au moyen d’un connecteur DIN, et le Minitel jusqu’à 4 800 bit/s (9 600 bit/s sur Minitel 2).

Caractéristiques du Minitel 2

  • Toutes les caractéristiques fonctionnelles du Minitel 1B
  • Jeu de caractères étendu DRCS (voir plus bas)
  • Microcontrôleur 80C32 cadencé à 14,318 18 MHz avec 256 octets de RAM
  • 8 kio de DRAM
  • Le logiciel du Minitel est stocké sur une EPROM de 256k bits

Différents modèles

Les caractéristiques techniques des Minitel étaient décrites dans des ouvrages de référence intitulés « STUM » (Spécifications Techniques d’Utilisation du Minitel), qui se déclinaient par modèle (STUM 1, STUM 1B, STUM 10etc.). Elles étaient disponibles initialement auprès du CNET puis de France Télécom.

En dépit de normes détaillées, il existait de légères différences entre modèles, et surtout entre fabricants. Il était possible pour le serveur d’« interroger le Minitel » pour en récupérer le modèle exact et, éventuellement, adapter le service :

  • Minitel 1 standard : fonctionne en standard ASCII qui permet le dialogue avec des banques de données internationales. L’affichage est en 8 nuances de gris (noir et blanc y compris).
  • Minitel 1 couleur : les 8 nuances de gris sont converties en couleurs : noir, rouge, vert, jaune, bleu, magenta, cyan, blanc (selon l’ordre des codes employés) ; noir, bleu, rouge, magenta, vert, cyan, jaune, blanc (selon l’intensité de gris) ; le clavier de ce modèle était par ailleurs extérieur à l’écran.
  • Minitel 1 dialogue : ce terminal, destiné principalement aux sourds et malentendants, dispose d’un logiciel de messagerie instantanée qui utilise le mode « retourné » du modem, il permet ainsi un dialogue par écrit avec un correspondant utilisant un autre Minitel de n’importe quel modèle, en s’appelant directement par le réseau téléphonique sans passer par l’intermédiaire d’un serveur.
  • Minitel 1B : son clavier est équipé de nouvelles touches, dont Fnct et Ctrl, permettant de modifier certains paramètres (minuscules/majuscules, retourner le modem, modifier le débit des communications…). Il est capable d’afficher 80 colonnes de texte, possède des fonctions supplémentaires d’affichage (« insérer ligne », « supprimer ligne »…), et son modem peut être retourné, c’est-à-dire que les débits en réception et en émission seront inversés. De plus, il est dit « bistandard », car il peut fonctionner en mode Videotex (24 lignes de 40 caractères) ou VT52 (en) (24 lignes de 80 caractères).

Les Minitels 1 étaient équipés de « mouchards » : deux zones mémoire de 8 caractères qui pouvaient être écrites et/ou lues par le serveur auquel le Minitel était connecté (équivalent d’un « cookie » sur le Web). La Commission nationale de l’informatique et des libertés les déclara illégaux, en particulier parce que le contenu des mouchards ne pouvait pas être directement consulté par l’utilisateur du terminal. Dans la pratique, quelques serveurs permettaient à l’utilisateur de consulter ces mouchards et d’y écrire les caractères de son choix. SM permettait aussi d’écrire un message de son choix dans les mouchards d’un autre utilisateur connecté à ce service, qui en était prévenu par un message.

  • Minitel 2 : permet à l’utilisateur de protéger, par un mot de passe, l’accès à son terminal. Le Minitel 2 dispose en outre d’une fonction répertoire (possibilité de pré-enregistrer jusqu’à 10 numéros). Il permet aussi un affichage graphique plus évolué en permettant de redéfinir les caractères (DRCS, Dynamical Redefinable Character Set — en français, JCRD, Jeu de Caractères Dynamique Redéfinissable). Cette fonction est peu utilisée car elle est lente et que le parc de Minitel 2 n’a jamais été assez étendu.
  • Minitel 5 : Minitel portatif à cristaux liquides qui a les mêmes fonctions que le Minitel 10 bistandard, combiné téléphonique en moins.
  • Minitel 10 : cumule les fonctions du Minitel et d’un téléphone sophistiqué. Il existe aussi une version bistandard (10b).
  • Minitel 12 : répondeur télématique capable de prendre une communication, d’afficher une page d’accueil et d’enregistrer le message écrit laissé par le correspondant.
  • Minitel Magis : apparu à la fin des années 1990, ce modèle redessiné apporte plusieurs innovations comme la possibilité de mettre un mot de passe, un assistant et un lecteur de carte à puce pour les achats en ligne.
  • Magis Club : Minitel pouvant afficher des images au format JPEG en 64 niveaux de gris. Son modem peut se connecter à 9 600 bit/s. Ce mode est souvent appelé TVR, pour Télétel Vitesse Rapide. Quelques services ont été spécifiquement créés pour cette version de Minitel, qui sait aussi gérer le DRCS et le mode bistandard, et inclut même un lecteur de carte à puce.
  • Sillage 1000 VR ; ce téléphone-répondeur-minitel compact fabriqué par Alcatel intègre un petit écran à cristaux liquides.

Le Minitel 1 (de La Radiotechnique), sorti en 1982.

Minitel Telic Alcatel.

Minitel photographique (modèle prototype non distribué) avec page de Vidéotex photographique.

Minitel 2 Telic Alcatel.

Minitel 5.

Minitel 10
(Telic Alcatel).

Minitel Magis.

Alcatel Web Touch.

Minitel destiné au marché grec.
 

Premiers modèles

Minitel conçu pour le marché japonais.

Les premiers modèles ont été livrés avec un clavier alphabétique (ABCDEF), choix de suite critiqué au moins par un ingénieur de La Radiotechnique impliqué dans le projet, déroutant pour les habitués des claviers normalisés des machines à écrire ou des terminaux informatiques en AZERTY ou QWERTY, sans arranger réellement les non-familiers des claviers. Ils ont été vite abandonnés au profit de la norme AZERTY. Les premiers modèles ne permettaient pas de garder à l’écran la mémoire de la dernière page consultée quand on se déconnectait du service consulté en ligne, car la page d’accueil du réseau s’affichait aussitôt. Deux solutions s’opposaient : rester connecté (et continuer à payer) pour garder cette page à l’écran, ou placer un boîtier de mémoire entre la ligne et le Minitel. Ces deux solutions étant coûteuses, la solution vint d’utilisateurs ayant trouvé qu’il suffisait de débrancher la prise téléphonique sans appuyer sur « Fin de Connexion ». Une autre possibilité était de frapper très rapidement, deux fois, cette même touche.

Au sein même de l’équipe de création du premier Minitel, la majorité était favorable à la technique du terminal passif, finalement adoptée. D’autres défendaient l’idée d’équiper le Minitel d’un processeur avec un bus, ouvrant la possibilité de cartes d’extension et un système d’exploitation. Les partisans de cette option, rétrospectivement plus favorable, n’ont pas obtenu gain de cause, principalement pour des raisons de prix de revient. Pendant quelques semaines a été exposé à la Fnac, un curieux hybride qui intégrait un micro-ordinateur, le Sinclair ZX81, dans un Minitel. Ainsi était réalisé le mariage du clavier écran modem sans processeur (le Minitel) avec le micro-ordinateur sans écran (le Sinclair). Pour trouver un micro-ordinateur communicant à cette époque, il faut se tourner vers le SMT Goupil G1, équipé d’un modem acoustique.

Sur les premiers modèles de Minitel 10 (équipés d’un téléphone), la touche permettant de composer sans décrocher n’était pas une touche ordinaire, mais exerçait une pression sur le contact de détection du combiné au travers d’une tringle munie d’un ressort (ce qui lui donnait un toucher très particulier). Le Minitel de base ne comportait pas de numéroteur (il fallait numéroter sur le téléphone et appuyer sur « Connexion/Fin »). Néanmoins comme il était également muni d’une prise péri-informatique (une simple liaison série), certains programmeurs arrivèrent à le faire numéroter en envoyant des séries de décrocher/raccrocher simulant la numérotation par impulsion. Ceci a été appelé la procédure « takatakata ».

Le Minitel a été ponctuellement utilisé en Côte d’Ivoire et des modèles ont été conçus pour le Japon et la Grèce (voir photo dans la galerie ci dessus). Il a été intégré dans diverses applications industrielles (terminal de gestion de magasins de stockage, de lignes de production, d’enregistrement de résultats de contrôles qualitatifs et quantitatifs, de gestion de programmes d’équipements informatisés, etc.) ou de service [commandes par les réparateurs des pièces détachées auprès de Service SA (groupe Philips), par exemple]. En 1987, pour réaliser les premières connexions transatlantiques, Jean-Louis Fourtanier, directeur du centre serveur CTL qui héberge nombre de services Vidéotex de presse, exporte clandestinement des Minitel aux États-Unis et au Canada permettant à des utilisateurs des deux rives de dialoguer en direct.

Fin de vie et recyclage

Conséquences d’Internet

À la fin des années 1990, le Minitel commença à être directement concurrencé par certains sites Internet, bien que le taux d’équipement en Minitel fût encore sans comparaison avec celui des accès internet.

En 1997, le Minitel rapportait six milliards de francs. Puis, Lionel Jospin, le Premier ministre, a souhaité favoriser Internet au détriment du Minitel.

En 2003, le Minitel représentait 47 % des revenus de l’ensemble Télétel, Audiotel, Internet.

Plusieurs points clés différencient le Minitel et Internet :

  • L’ergonomie des systèmes informatiques ainsi que celle des services disponibles par Internet a évolué de façon plus rapide que celle du Minitel, tant en matière d’affichage (la résolution graphique des images, puis plus tard des vidéos, fut supérieure sur ordinateur) que d’interface homme-machine (la souris, et plus tard les écrans tactiles, n’ont pas eu d’équivalents pour le Minitel) ;
  • Le débit moyen des connexions Internet a continuellement progressé, alors que celui des Minitels est resté identique ;
  • La rapidité de démarrage du Minitel a été rattrapée par celle des ordinateurs (dans les années 1990, un ordinateur pouvait demander plusieurs minutes pour démarrer, alors qu’il est désormais possible de le faire en quelques secondes, dans le cas d’une veille prolongée ou avec les ordinateurs où le système est installé sur SSD par exemple).

Il existe cependant un débat autour de la question « le Minitel a-t-il favorisé, ou pas, l’émergence d’Internet ? » :

  • L’argument qui semble l’avoir favorisé est l’aspect éducatif, et plus particulièrement la familiarisation à utiliser le couple clavier/écran ainsi que l’interrogation d’un moteur de recherche (avec l’Annuaire électronique de France Télécom) ;
  • La thèse opposée explique que la France accusait un retard notable en accès Internet dans les années 1990 (retard rattrapé dans les années 2000).

Le Minitel étant un terminal ; techniquement il peut être utilisé pour accéder à Internet en mode texte. Anecdotiquement, des passerelles Minitel/Internet furent mises en place pour accéder à certains services internet depuis le Minitel (messagerie électronique et newsgroups) et même des services professionnels (bancaires…). Un serveur de conversation comme XYZ créa quelque temps un site Internet du même nom permettant de se connecter depuis un ordinateur. Les connectés par ce moyen ne rapportaient rien, mais assuraient une « masse critique » de connectés susceptible de retenir les usagers Minitel du même serveur.

  • En 2013, le projet Cervin a ressuscité des minitels en leur permettant d’envoyer des tweets depuis une passerelle Arduin.
  • En 2017, plusieurs micro-serveurs Minitel sont mis ou remis en ligne, accessibles par numéro direct à 10 chiffres.

i-Minitel

i-Minitel est une norme lancée en 2000, qui permettait à l’utilisateur d’accéder à des services Minitel via l’Internet avec un ordinateur, une connexion bas débit ou haut débit, et un logiciel navigateur spécialisé. Le service n’est pas disponible hors de la France métropolitaine ni à l’étranger, parce qu’il faut avoir une ligne fixe France Télécom. Le service est désormais fermé du fait de la fin du Minitel.

Impact environnemental et démantèlement

Sur les autres projets Wikimedia :

En 2004, un article de ZDNet annonce que l’opérateur historique « cède à titre gracieux » les Minitels de première génération à ses clients. Pour les associations écologistes, France Télécom se défausse de ses responsabilités en matière de recyclage des déchets. » Ce que dément l’opérateur. La même année, un article du site web Brest-ouVert estime que « par un tour de passe-passe France Télécom s’apprête à se débarrasser de ces millions de minitels de la première génération, en fin de vie, que la réglementation l’obligerait bientôt à collecter puis à recycler. »

Depuis des années des Minitels non utilisés sortent du circuit de recyclage de France Télécom « Je vois de nombreux Minitels dans les brocantes. Des compagnons Emmaüs m’ont dit qu’ils en vendaient beaucoup aux étrangers ».

En 2012, La Dépêche du Midi écrit : « dans un souci de préservation de l’environnement, Orange a mis en place un dispositif de collecte et de recyclage des Minitels », ce qui est confirmé par Orange.

C’est à Toulouse que sont démantelés les Minitels collectés par Orange.

Source : Wikipédia

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